Kanoun De La Mamera (Du Coran) De Tifrit Naït Ou Malek (Aït Idjer) *
Louange au Dieu unique! Rien n'est durable que sa souveraine Puissance. L'empire des temps appartient à Dieu. Karoun (réglement) des tôla demeurant à l'établissement du saint, du vertueux Sid Ahmed ben Malek, (Sidi M'hand Oumalek) de qui vient ce Karoun, rédigé sous son inspiration.
- Lorsqu'un individu désire être admis dans la mimera, tous les tôla sont convoqués et le postulant doit faire un versement de 5 douros (el-habeas).
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L'étranger n'est admis qu'en produisant un tiers qui se porte sa caution, en cas d'actes coupables et de fuite.
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Un supplément de 5 sous est donné par le postulant pour les serviteurs (ikeddachen).
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Les ikeddachen versent, en entrant à la mâmera, chacun 1 douro entre les mains du mok'addem. Ce dernier, leur chef à tous, emploie ces fonds au profit de l'établissement.
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Pour coups portés avec la main, ou pour insulte, le taleb paye 1 douro. S'il frappe un serviteur (akeddach), l'amende est de 5 temen (le temen) vaut 25 centimes), un temen pour chaque doigt. Quant aux coups portés avec le fer, la lance, par exemple, ou avec des armes, comme le djenoui (sorte de coutelas), c'est un cas qui ne s'est jamais présenté. Les coups de bâton et de pierres sont punis d'une amende de 5 réaux baçita; puis on brûle les effets du coupable, qui est banni de la mâmera.
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A tout taleb qui se refuse au transport des vivres, comme le blé, l'orge et autres denrées, le mok'addem inflige 6 sous d'amende.
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Quand des tolba voyagent au nombre de trois ou quatre, le mok'addem leur. prépose un délégué qui a autorité sur eux. Voyagent-ils sur des mulets de la mâmera, s'ils les montent dans les descentes, ils payeront 2 douros d'amende pour chaque mille parcouru et 2 fr. 50 cent. par tête, s'ils montent deux en croupe (en pays de plaine). .A l'époque de la quête, une amende de 10 sous est infligée à ceux qui veulent sortir' du village sans la permission du mok'addem et à celui qui montre de la mauvaise volonté dans la quête: celui qui ne prend pas part à la quête est frappé d'une amende de 2 douros. La quête faite, on achète, l'été, des oranges; l'hiver, des raisins secs et de la viande, le tout payé des deniers de la mâmera.
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Au dîner, un surveillant est affecté à chaque plat, afin que les convenances soient observées et qu'on mange suivant les règles de la bienséance. A ceux qui voudront se lever:«Mangez, dira-t-il, Dieu vous fera miséricorde». Les convives une fois levés, celui qui continue à manger est passible d'une amende.
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Quand la marmite ou le chaudron est sur le foyer, une amende de 10 sous est payée par le taleb qui entre dans la cuisine, sans y être autorisé par les serviteurs (ikeddachen).
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La même peine atteint celui qui frappe un chat; celui qui le tue est renvoyé.
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Au diner, on donne d'abord à manger aux chats. Ensuite on sert le cheikh, puis les iât't'aben. Alors, sur l'ordre du mok'addem, les serviteurs comptent les hôtes, et, quand ceux-ci ont mangé, vient le tour des tolba.
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L'oukil tient un compte des objets, tels que tellis, marmites, en un mot, de tout ce que possède l'établissement.
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Au déjeuner (repas du pain), tous se mettent en cercle, les tolba d'un côté, les serviteurs de l'autre, et tous mangent ensemble. Celui qui prend une figue et la remet sur la natte paye 5 sous d'amende, s'il est taleb, ou doit cinq journées de travail consécutives, s'il est serviteur.
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Pour convoquer la djemâa, le mok'addem fait appeler les tolba par les serviteurs.
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Dès qu'ils sont réunis, on récite le fath'a, puis les anciens prennent la parole. Celui qui parle sans que le mok'addem l'y ait invité est puni de 10 sous d'amende. Les affaires de la mâmera une fois réglées, on récite le fath'a.
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Si le mok'addem met un taleb à l'amende devant des hôtes, il est frappé lui-même d'une amende de 5 réaux.
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Si les serviteurs n'enlèvent point les chaussures de cuir ou de bois du taleb qui entre chez eux, ils doivent cinq journées de travail et reçoivent la bastonnade sur la plante des pieds.
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Lorsque, assis dans leur salle, ils ne se lèvent point respectueusement à l'entrée d'un taleb, ils sont passibles de la même peine.
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Le serviteur qui néglige de balayer la salle où est préparé le couscous paye la sous d'amende ou doit cinq journées de travail.
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Le surveillant des serviteurs qui s'absente, sans en laisser un autre à sa place, doit cinq journées de travail et reçoit la bastonnade chaque jour.
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Le chef des serviteurs est choisi par le mok'addem sans qu'il ait à consulter les tolba.
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Le serviteur qui sort de l'enceinte de la mâmera à l'insu de son chef doit cinq journées de travail et reçoit la bastonnade chaque jour.
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Si un taleb, après avoir lavé ses vêtements, est sali par un serviteur, taché d'huile, par exemple, il se plaint aux camarades de ce dernier, qui est condamné à cinq journées de travail.
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Même peine frappe le serviteur qui ne répond point au taleb dont il reçoit un ordre.
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Si un taleb employé à un travail veut faire ses ablutions, il doit en demander l'autorisation au mok'addem, qui lui désigne un remplaçant.
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Le taleb qui ne prie pas à son rang en même temps que le cheikh est condamné à 10 sous d'amende.
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Le taleb qui laisse une jarre ou tout autre vase sans couvercle paye 1 douro d'amende. Le serviteur coupable de la même faute doit dix journées de travail.
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Si le mok'addem frappe un taleb, il est condamné à payer 5 réaux. Le taleb qui frappe le mok'addem paye la même somme et est chassé.
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Celui qui tient un langage grossier devant le cheikh, est puni de 2 francs d'amende.
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Le serviteur qui, en présence du mok'addem, refuse d'obéir à un taleb, paye 1 fr. 50 cent. ou doit dix journées de travail.
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Les tolba qui se battent en présence du mok'addem payent une somme que fixe le maître de la mâmera.
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Les ikhammasen (iât't'aben, isek'k'aien) reçoivent un pain le matin et ont un plat à leur dîner. Ils touchent en outre 1 douro pour leur chaussure. Leurs gages s'élèvent à 50 douros par an, sans compter la nourriture, qu'ils prennent en commun avec les tolba.
Extrait : A.Hanoteau et A.Letourneux : La Kabylie et les coutumes Kabyles Tome troisième p 319-321, édition 1861.
* Reproduit comme écrit à l'origine